jeudi 27 mars 2014

Eurêka... de la sérendipité

La sérendipité, un mot décrivant un phénomène qui semble bien loin de TRIZ et de ses concepts ?
Ce mot, dont on entend souvent parler à propos de découvertes, est par ailleurs assez difficile à traduire.

La page wikipedia qui lui est consacrée en donne une bonne explication.
A mon sens, ce phénomène n'est pas si loin des démarches de créativité engagées avec TRIZ.



J'aimerai évoquer deux exemples particuliers autour de ce terme:

D'une part la définition d'Arthur Koestler, "Le Cri d'Archimède"
Pour ceux habitués à des raisonnement TRIZ, on pourrait penser à quelque chose d'opposé à la démarche proposée par TRIZ. En créativité, on a souvent cette image du savant qui, d'un seul coup, a une idée lumineuse, comme venue de nulle part.

 D'autre part, cet exemple (extrait de wikipedia):
"Un bon exemple en est la découverte des crochets de bardane qui, en s'accrochant malencontreusement aux poils de son chien lors de ses promenades, ont conduit George De Mestral à inventer le Velcro. De Mestral ne cherchait rien. Il promenait son chien. Et s'il cherchait quelque chose, c'était de le débarrasser des fruits de bardane qui s'accrochaient à ses poils ou de trouver le moyen qu'il ne s'en accroche pas d'autres lors de la prochaine promenade. Il regarde les fruits au microscope. Cela lui donne l'idée d'une fermeture textile en nylon. C'est une découverte qui déclenche accidentellement un long processus d'invention et d'innovation (l'idée est de 1941, le brevet de 1955)."

 Ces deux exemples mettent en avant la part non prévisible de la créativité.
Dans l'exemple d'Archimède (et en suivant la légende) on constate que celui-ci, en prenant son bain  découvre le principe qui porte son nom.
Archimède n'était pas le premier confronté à ce problème, et a su le résoudre en observant un phénomène naturel (son propre corps plongé dans son bain).
On a donc affaire à un individu qui  sait connecter une observation comme ressource à un problème existant (déterminer les lois de l'hydrostatique). Par contre, il est difficile de savoir si c'était un problème qui le préoccupait au moment de cette découverte.

Dans l'exemple de la bardane, l'observateur a utilisé une observation et l'a transposée comme solution à un nouveau problème. 
Ici, c'est face à une solution observée que l'observateur a su trouver quel problème pouvait être traité.

Dans les deux cas, l'observation d'un phénomène a permis de faire de celui-ci ressource  d'un problème existant. On fait appel ici à notre capacité de voir au travers une observation une application radicalement nouvelle, bref être capable de transposer cette observation dans un autre environnement.

Alors, d'une part, TRIZ mentionne que des solutions innovantes dans un domaine peuvent exister dans d'autres domaines. C'est le cas du velcro par exemple.
La biomimétique s'appuie d'ailleurs sur cette démarche de recherche, utilisant des principes utilisés dans la nature, y compris le vivant, pour élaborer des nouveaux produits, remplir une nouvelle fonction..

Et d'autre part, TRIZ, encore une fois, insiste sur la capacité d'observation que l'on doit être à même de développer, pour pouvoir utiliser son environnement comme ressource. c'est exactement ce qui se passe dans les exemples cités.

Il est certain, dans le cas d’Archimède, que  celui-ci disposait de qualités lui permettant de faire ce travail, étant inventeur de nombreux systèmes, et, par ailleurs, mathématicien.
Il en est de même pour George De Mestral et son Velcro.

Donc, la sérendipité nécessite la présence des éléments suivants:
  • Disposer d'une forte capacité d'observation et d'analyse
  • Être curieux et ouvert à la nouveauté
  • Avoir la capacité de transposer une solution trouvée à un nouveau problème.
Ces éléments sont ceux que l'on attribue généralement à des personnes dotées d'un tempérament créatif. Donc il serait vain de penser que ce type de découverte est possible à tout un chacun, sans avoir soi même travaillé à ce que ces connections soient possibles.
D'ailleurs, TRIZ vient avec son lot d'outils, mais c'est en pratiquant au quotidien que ces outils donnent tout leur potentiel. Dans ce schéma, TRIZ guide vers la solution dans un processus structuré, tout autant qu'il modifie le mode de réflexion de celui qui l'applique.
Parmi les jeux que nous avons développé, deux tout particulièrement travaillent cette capacité d'association:
  • Le jeu #6: l'animal imaginaire qui, quant à lui, essaye de de faire décrire une chimère ayant la tête d'un animal sur le corps d'un autre.
La sérendipité est donc un cas particulier de processus de créativité.

D'autre part, il existe bien un processus volontaire qui se rapproche de ce concept, bien qu'il ne fasse pas appel à l'aspect fortuit de la découverte, mais plutôt à l'association.
Par exemple, lors du dépôt d'un brevet couvrant une invention, la question qu'il est nécessaire de se poser est de déterminer à quoi d'autre cela pourrait être utile. Dans ce cas, le "phénomène" observé est l'invention, et l'on cherche une transposition de cette invention dans des domaines connexes.


Pour finir, bon nombre de découvertes sont le fait de "heureux hasards" comme décrit dans cet article sur l'amélioration de la conductivité.
TRIZ, en tant que démarche structurée, permet d'augmenter la capacité d'innovation en mettant en place des processus de résolution, des outils et techniques, mais il n'en reste pas moins qu'il faut garder à l'esprit que d'autres entrées créatives sont toujours possibles... heureusement.

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